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A qui peut se vaincre soi-même, il est peu de chose qui puisse résister. C'est toujours l'impatience de gagner qui fait perdre. Ce qui nous occupe est quelquefois moins difficile que ce qui nous amuserait seulement. Les empires ne se conservent que comme ils s'acquièrent, c'est-à-dire par la vigueur, par la vigilance et par le travail. Cette douceur qu'on se figure dans la vengeance n'est presque pas faite pour nous; elle ne flatte que ceux dont le pouvoir est en doute. En parlant de nos affaires, nous n'apprenons pas seulement beaucoup d'autrui, mais aussi de nous-mêmes. Encore qu'il soit de la probité d'un prince d'observer indispensablement ses paroles, il n'est pas de sa prudence de se fier absolument à celle d'autrui. Il est d'un petit esprit, et qui se trompe ordinairement, de vouloir ne s'être jamais trompé. Il faut de la force assurément pour tenir toujours la balance de la justice droite entre tant de gens qui font leurs efforts pour la faire pencher de leur côté. L'artifice se dément toujours, et ne produit pas longtemps les mêmes effets que la vérité. Quand on peut tout ce que l'on veut, il n'est pas aisé de ne vouloir que ce que l'on doit. L'esprit achève ses propres pensées, en les mettant au-dehors. L'Etat, c'est moi. La décision a besoin d'un esprit de maître; et il est sans comparaison plus facile de faire ce qu'on est, que d'imiter ce qu'on n'est pas. La fonction de roi consiste principalement à laisser agir le bon sens, qui agit toujours naturellement et sans peine. La gloire n'est pas une maîtresse qu'on puisse jamais négliger, ni être digne de ses premières faveurs, si l'on n'en souhaite incessamment de nouvelles. La sagesse veut qu'en certaines rencontres on donne beaucoup au hasard; la raison elle-même conseille alors de suivre je ne sais quels mouvements ou instincts aveugles au-dessus de la raison, et qui semblent venir du Ciel. Le dernier argument des rois: Ultima ratio regum. Le travail n'épouvante que les âmes faibles.